14h00
« Une langue venue d'ailleurs » lu jusqu'au chapitre 10 : « Je soupçonnerais qu’il y a un effet semblable dans le chant. »
... — une sorte de Gerald Moore par rapport à Dietrich Fischer-Dieskau —, « Winterreise » Schubert.
Jean-Pierre Richard « Littérature et sensation. »
- Avant-Propos :
On s’accorde assez communément aujourd’hui à reconnaître à la littérature une fonction et des pouvoirs qui débordent largement son rôle ancien de divertissement, de glorification ou d’ornement. On aime à voir en elle une expression des choix, des obsessions et des problèmes qui se situent au cœur de l’existence personnelle. Bref la création littéraire apparaît désormais comme une expérience, ou même comme une pratique de soi, comme un exercice d’appréhension et de genèse au cours duquel un écrivain tente d’à la fois se saisir et se construire.
- Chapitre 1, premier paragraphe :
Tout commence par la sensation. Aucune idée innée, aucun sens intime,
aucune conscience morale ne préexistent dans l’être à l’assaut des choses. Le
héros stendhalien se dresse en face de l’univers aussi démuni, aussi libre de
préjugés que le premier homme au matin de la création. Stendhal reçoit en
effet du XVIIIe siècle l’image d’un héros vierge et nu que sa seule expérience
instruira peu à peu. Julien au séminaire, Fabrice à Waterloo sont eux aussi des
ingénus ; dignes fils du Huron de Voltaire ou du Persan de Montesquieu, ils se
forment par leurs sensations, se laissent amener par elles à la connaissance
des choses et à la conscience d’eux-mêmes. Mais, et ceci les distingue
profondément de leurs aînés, ils ne se contentent pas d’attendre passivement
la venue de l’expérience : ils vont au-devant d’elle, au besoin même ils la
provoquent. Homme de l’ère napoléonienne, disciple de Maine de Biran,
Stendhal a appris les vertus de l’effort et de l’activité. Et devant ses héros la
vie s’étend comme une brousse sensuelle au travers de laquelle il s’agira de se
tailler le plus savoureux chemin. Le bonheur pour eux ne s’attend pas, comme
dans l’ancien épicurisme : il se chasse et se force. La sensation est une proie, à
la fois le cadeau d’un hasard et la récompense d’un courage. La chasse au bonheur peut alors aboutir à la réussite de quelques instants parfaits, dont le contenu sensible suffit à résumer et justifier une vie
14h15
« Une langue venue d'ailleurs » lu jusqu'au chapitre 11 : « Oui, le français est un instrument de musique pour moi. C’est le sentiment que j’ai depuis longtemps, depuis, tout compte fait, le début de mon apprentissage. Pour devenir un bon instrumentiste, il faut de la discipline, je dirais même le sens de l’ascèse. Et c’est ce que je dis à mes étudiants aujourd’hui : maîtriser le français, c’est en jouer comme jouer du violon ou du piano. Chez un bon musicien, l’instrument fait partie de son corps. Eh bien, le français doit faire partie de son corps chez un locuteur qui choisit de s’exprimer en français. En musique, il y a tous les niveaux, du niveau débutant au professionnel en passant par le niveau amateur. C’est pareil en langues. Le niveau professionnel ne s’acquiert pas en deux ou trois ans. Il faut des années de travail et toute une vie pour l’entretenir... Vous aimez le français. D’accord. Mais qu’est-ce que ça veut dire pour vous, « aimer le français » ? Êtes-vous prêts à faire du français comme pour devenir un vrai musicien ? Pourquoi ces questions ? Parce que je suis moi-même comme un musicien qui s’entraîne tous les jours. La différence entre un musicien et moi, c’est que je suis un instrumentiste sans public. Personne ne s’intéresse à mon jeu, je n’ai pas de répertoire, je n’ai aucun morceau célèbre à jouer devant un auditoire. Ma performance n’est pas une marchandise. Je joue pour moi seul et c’est bien ainsi. »
14h15
« Une langue venue d'ailleurs » lu jusqu'au chapitre 11 : « Il me semble que j’éprouvais un plaisir proprement musical, en m’abandonnant aux rythmes et aux mouvements ascendants ou descendants des phrases qui se déployaient dans ces pages. Habitué à l’exemple de la musique qui proposait des notions comme thème, reprise, ou variation, j’étais devenu peu à peu sensible aux phénomènes de « retour du même » dans les lignes que je lisais et relisais à haute voix avec ou sans modèle. »
14h15
« Une langue venue d'ailleurs » lu jusqu'au chapitre 10 : « Il était donc temps de reprendre contact avec les textes de Rousseau mis un peu à l’écart au profit de l’enseignement au CFP ; mais aussi le moment était venu de m’initier pour de bon aux grands textes critiques pour apprendre à parler, par une sorte de mimétisme naturel, à un texte littéraire ; autrement dit, apprendre la manière de l’aborder et de le questionner, permettant de construire un discours d’accompagnement critique, comme un pianiste accompagnerait un chanteur abordant un lied schubertien. »
"Le Fantôme" de Brassens.
Je conviai, sournoisement,
La belle à venir un moment
Voir mes icônes, mes estampes...
(2'15)